Chapitre 15 : Un nouveau monde
Vamy Lilyah :
Je me réveillais sur le lit de ma cabine constatant que j’étais sur les couvertures. De plus, je n’avais même pas retiré mes bottes. Je me levai et essayai de me rappeler ce qui s’était passé. Soudain les souvenirs me revinrent à la mémoire.
Je jouais à la biosphère avec Xorth et Kara à cache-cache lorsque Nilane était venue nous prévenir pour nous amener, comme le reste de nos compagnons, à la salle de pilotage. Nous étions attirés par une supernova. Jonas alias le militaire (je ne pouvais pas m’empêcher d’assimiler ensemble ces deux notions) avait pris les commandes. Ainsi nous nous étions tirés de justesse de l'attraction de la supernova. A quelques minutes près, nous aurions ressemblé à des poulets grillés ou plutôt nous aurions été des humains grillés accompagnés d’un chat rôti. Après je pouvais me souvenir que nous nous étions retournés dans nos cabines. Ensuite je devinai que je m’étais endormi sous le coup des émotions. A mon avis, les autres devaient certainement m’avoir imité.
Les jours qui suivirent, le voyage se poursuivit tranquillement. Tout restait calme à bord. Pour ma part, je m’occupais soit à lire soit à jouer avec Xorth et Kara. Nilane restait pour le plus souvent à l’infirmerie afin de vérifier ses produits médicinaux. Mais une chose m’intriguait. Pourquoi Xorth la rejoignait t-il si souvent? Je lui avais parlé un jour alors qu’il sortait de l’infirmerie afin de le questionner sur ce que Nilane lui faisait subir. Celui m’avait répondu qu’elle pratiquait des examens. Des expériences, je pouvais comprendre. Alors traitait t-elle Xorth comme un sujet d’expérience comme ceux l’ayant crée ? Non, non et non, ce ne pouvait pas être possible. Cette fois, je devais en parler. Je poussai la porte de l’infirmerie et j’y pénétrai. Nilane était assise devant un bureau à écrire des choses sur un cahier. En me voyant entrer, elle le referma et se releva.
_ Qu’avez vous, Liliah ? Seriez vous souffrante ? Les seules fois où vous venez ici c’est pour accompagner un blessé ou lorsque votre jambe a été blessé, fit Nilane gentiment.
_ Ne vous inquiétez pas. Je vais parfaitement bien, répondis-je. Je voulais vous parler de Xorth. Il est ici très souvent. Que lui faites-vous subir? Il m’a dit que vous faisiez des sortes d’expériences. J’aimerais savoir ce que c’est.
_ Je comprends que vous puissiez vous faire du souci pour Xorth. Néanmoins, je peux vous assurer qu’il est entre de bonnes mains avec moi. Ayez confiance, me répondit Nilane d’une voix calme et sincère.
_ Je l’espère alors, fis-je.
Oui. Je l’espérais. Elle semblait sincère. Pourtant je n’arrivais pas à faire tout à faire confiance. Les médecins sont la race d’humains la plus dangereuse après tout.
Jonas, restait à la salle de pilotage afin de s’assurer que nous ne dévions pas de notre trajectoire. Il restait souvent seul sans parler à personne. Cela me troublait un peu. Le détail qui me semblait le plus curieux et étrange était qu’il ne se disputer même plus avec Nilane. Ou il se passait quelque chose avec lui ou je devenais complètement folle. Par moment j’aurais bien aimé être une petite souris _(finalement non. Je n’aime vraiment pas ces bestioles depuis le jour où des filles de mon dortoir à l’orphelinat en avait mis une dizaine dans mon lit) plutôt un petit hamster_ afin de savoir ce qu’il faisait tout seul.
Mike vérifiait par mesure de précaution que tout fonctionnait dans le vaisseau. Par moment, il venait à la biosphère se reposer où nous parlions ensemble en regardant Xorth et Kara jouer. Nous devenions assez proches tous les deux. Nous essayions de communiquer avec le Balafré. Malgré des débuts difficiles, nous commencions à avoir un véritable contact. Cependant il n’abordait que des choses anodines et aucune chose personnelle. D’un côté, j’étais pareil un peu. Je ne disais pas vraiment grand chose sur mon passé. Je ne pouvais pas le forcer à parler de lui. Nous n’en aurions rien obtenu. Enfin pour revenir au Balafré, il ne manifestait aucun sentiment ni affection mais nous sentions qu’il commençait à nous apprécier.
Rhoan était pratiquement toujours dans son laboratoire mais j’ignorais quelles étaient ses activités. Pourtant je remarquais que lorsqu’il sortait de son antre, il semblait épuisé. Et plus les jours passaient, plus il paraissait épuisé.
Kara et Xorth étaient très souvent ensemble à jouer dans la biosphère. Je les rejoignais souvent pour jouer avec eux. Par moment, Mike se joignait également à nous.
Cependant le voyage ne fut pas toujours aussi calme et paisible. A un moment, nous arrivâmes confrontés à une pluie d’astéroïdes. Comme lors de l’épisode avec de la supernova, nous nous réunîmes dans la salle de pilotage. Ce fut Mike qui pilota le vaisseau tandis que Jonas lui disait où passer pour éviter que nous nous fracassions sur un de ces astéroïdes. Nous, nous restions sur nos sièges à regarder, attendre et prier.
Ensuite le voyage reprit de manière normale et tranquille. Cela devait faire un mois que nous avions quitté la Terre, ma planète d’origine, afin de gagner Epsolin, la patrie de Xorth et de ses compagnons.
Un jour, j’étais à la biosphère étendue à plat ventre sur le sol à lire tandis que Xorth et Kara jouaient à colin-maillard. Soudain les oreilles de Xorth se dressèrent puis il se dirigea vers la fenêtre où Kara le suivit. Intriguée par le comportement de Xorth, j’abandonnai mon livre et me relevai afin de les rejoindre. Je pus voir à travers une fenêtre une planète que Xorth fixait comme hypnotisé. Son attention était un mélange de sérieux et d’excitation. Puis il pointa son index vers cette planète et dit:
_ Ma planète.
Je sursautai presque. Alors nous étions enfin arrivés à Epsolin. C’était exceptionnel et incroyable. Nous étions aux termes de notre voyage spatial. A présent, nous devions guérir les congénères de Xorth. Je resongeais à ma promesse en regardant Xorth ainsi que ma conversation avec Nilane. J’espérais que Nilane soit aussi motivée que moi.
Jonas Atrayde :
Tout le monde venait de se rassembler dans la salle de commande. Cela me faisait une drôle de sensation car je m’étais rapidement habitué à la demi solitude que je vivais depuis quelques semaines dans cette salle. Xorth avait l’air excité de voir que nous nous rapprochions de plus en plus de sa planète natale. J’entrais les dernières coordonnées d’atterrissage, puis je fis très lentement descendre le Magellan vers l’atmosphère. J’étais un peu inquiet ! Après les périlleuses manœuvres que j’avais du effectuer pour nous sortir de la super nova il y a quelques semaines, j’espérais que la coque n’avait pas subi de dommages, sinon…
Nous subissions quelques secousses, mais tout allait bien. En attendant, je relevai l’immense volet en face de moi pour voir enfin de quoi ce fameux lieu où les Nimrodh vivaient, avait l’air. Je sentais l’impatience grandir autour de moi, et toujours ces maudits nuages pour nous empêcher de voir quoi que ce soit !
La petite Kara tout comme Xorth, avait les yeux rivés sur les épais nuages blancs, retenant leur souffle jusqu’à ce qu’ils se dégagent enfin !
Quel spectacle hallucinant ! J’avais déjà été émerveillé par la beauté synthétique de la biosphère du vaisseau, mais là, je pensais au fait que nous allions peut être pouvoir toucher de nos mains ce paysage…
Des forêts vertes, des plaines de toutes les couleurs possibles et imaginables, de la lumière vive et brillante qui n’était pas artificielle ! Dire que c’était peut à cela que ressemblait la terre il y a quelques siècles et que le conflit entre Solarians et Terriens avait littéralement transformé toute la géologie terrestre…
Depuis des semaines, j’avais de plus en plus de raisons d’être dégoûté d’avoir été militaire pendant si longtemps, car c’était à cause de gens comme moi que notre planète Mère ressemblait à une planète morte… au lieu de ressembler à un paradis climatique comme celui qui s’étendait devant nous…
_ Atrayde, vous comptez nous faire atterrir, oui ou non ?! grogna le savant fou.
Je n’avais vraiment pas l’habitude de m’extasier ainsi devant les merveilles de l’environnement, j’en avais presque négligé les préparatifs d’atterrissage. Je me remettais immédiatement au travail ! Tout en me promettant de faire un jour ravaler sa langue à ce scientifique…
Après 20 minutes de descente délicate, j’arrêtais définitivement le réacteur principal à 2 mètres du sol, d’après notre altimètre. Je lançais un scanner à l’aide du module d’analyse d’atmosphère, découvrant rapidement que l’air de la planète était bel et bien respirable.
J’allais mettre les pieds sur une planète qui avait été gardé secrète depuis 800 ans par le gouvernement Solarian ! Je devrais être plus excité, comme tout curieux, mais j’avais encore en tête tous ces souvenirs… Des semaines que je traînaient dans ma tête toutes ses révélations, et je n’arrivait pas à m’en débarrasser ! J’en avais assez ! Mais il n’y avait rien à faire. A moins qu’un quelconque événements ne me fasse surmonter ces horribles visions dans ma tête, j’étais définitivement condamné à vivre avec pour le reste de ma vie…
Tout le monde avait déjà quitté la salle, se préparant à débarquer. Tous, sauf moi… Je fus parcouru d’un frisson quand le Docteur Bah me prit par la main, voyant que j’étais plus prêt à rester dans la salle de commandement plutôt que de descendre explorer les environs…
_ Venez Jonas, on a encore besoin de vous !
_ Pourquoi ? On est arrivé, vous n’avez plus besoin d’un pilote ! Je peux rester ici…
_ Jonas, ce n’est pas le moment de vous morfondre une nouvelle fois dans votre chagrin ! Venez, cela vous aidera sûrement !
Cette fois, je ne pus résister à lui poser la question que me tenaillait les tripes depuis qu’elle m’avait opéré.
_ Pourquoi faites vous ça ? Pourquoi vous occuper autant de moi ? Vous avez veillé sur moi depuis que vous m’avez enlevé cet implant !
Elle hésita à répondre.
_ Vous être mon patient… je dois veiller…
_ Conneries !! Je n’y crois pas !! Il y a autre chose, vous ne pourrais pas me le cacher !!
Elle lâcha ma main et recula de quelques pas. J’avais quasiment hurlé sans m’en rendre compte. C’était à ce moment que je fis une chose que je n’avais jamais faite auparavant. Il y a encore peu de temps, je n’imaginais pas que j’arriverais à faire ça…
_ Dé… désolé ! Je s… je sais... pas ce qui m’a pris !
Elle se rapprocha et m'attrappa l'épaule.
_ Ca va aller. Mais venez avec nous, ne restez pas ici tout seul, s’il vous plait !
Elle avait peut être raison, après tout. Je ne devais pas continuer à faire comme avant, rester cloîtré dans ma vengeance et ruminer tout mes souvenirs. Il fallait bel et bien que je tourne la page. Mais… pour faire quoi ? Je n’étais pas encore sûr. Le seul moyen que j’avais à disposition pour le savoir était de les suivre, de faire comme eux. Car tous dans ce groupe (sauf peut être le savant) avaient le choix, le choix de faire ce qu’ils avaient envie de faire. Et ce dont ils avaient envie de faire, c’était d’aider le peuple qu vivait sur cette planète.
Je me réveillais de ma réflexion, et m’aperçus que Nilhane me tenait toujours l'épaule. Cela devenait assez gênant, je m’en dégageais assez rapidement, puis dis :
_ Je viens ! Laissez moi juste quelques minutes !
_ Bien, nous allons sortir du vaisseau, mais nous vous attendrons en bas !
Elle sortis de la salle et le sas se referma derrière elle. Elle était calme, lorsqu'elle me parlait... en fait, je pense qu'elle était de moins en moins nerveuse en ma présence. Pourtant, je me rappelais l'avoir vu sur le point d'exploser de terreur, encore récemment. C'était au moment où nous passions au plus près de cette super nova. Plus nous nous approchons, plus elle était terrifiée... Est-ce que c'était la chaleur qui avait provoqué ça ?
Et puis à quoi bon y penser, ça n'avait aucune espèce d'importance ! Ce n'était demain la veille que nous nous approcherions à nouveau d'une super nova !
J’espérais à présent que cette cure mentale sur la planète de Xorth allait m’être utile…
Je me levai du siège et me dirigeai vers un assez gros boîtier sur le tableau de commande. A mon approche, les sécurités autour du boîtier s’écartèrent, me laissant le loisir de le prendre en main. Cela permettait de commander à distance toutes les principales fonctions du vaisseau. En effet, j’avais décidé de nous faire atterrir sur une large plaine. Etant donné que les créatures de cette planète ne possédaient certainement pas d’armes de poing, le Magellan n’avait rien à craindre, mais il valait tout de même mieux ne pas laisser les sans grand ouvert pour permettre à n’importe quel animal de venir endommager la belle machinerie de ce vaisseau !
Je m’apprêtai alors à rejoindre les autres.
Kara :
La planète de Xorth, la planète de Xorth...
Après le long voyage qu´on venait de faire, on va enfin marcher sur la planète de Xorth !
Et les Xorths que j´ai vu... Ceux dans l´endroit tout vert. La petite Xorth, la grande et le vieux... Je les verrai ? Ils seront là ? Je pourrai les toucher ? Leur parler ?
Pendant le voyage dans la "Base-vaisseau", on a eu plein d'aventures ! C'est "L'Etoile géante" qui m'a fait très peur. Ça m'a rappelé quelque chose... Ah mais ! J'avais oublié... C'était sombre, très sombre et puis ça brillait...
Par contre, il y a eu une aventure qui m'a fait beaucoup rire ! On s'est baladé entre des pierres énormes qui flottaient dans le ciel. Tout le monde avait peur, mais moi je trouvais ça si amusant !
"Kara ?"
Oh... Xorth est là devant moi. Il sourit, et il bouge, enfin... sa queue et ses oreilles n'arrêtent pas de bouger, c'est rigolo !
Tiens, Jonas arrive. Il est resté derrière pour faire quelque chose mais je sais pas quoi. Il ne manque plus à "Maman" que d'ouvrir le sas et on pourra courir sur la planète à Xorth !
Pffu... "Maman" et les autres sont curieux. Ils ont les yeux grands ouverts et ils bougent pas.
Bon ! S'ils veulent pas bouger et ben je vais le faire !
Je trottine jusqu'au bouton et j'appuie très fort. Ça grince, ça fait du bruit. Voilà ! La porte est grande ouverte.
Je bondis, je cours, je vole et je crie en piétinant la belle herbe verte. Xorth me suit et semble tout heureux, les oreilles et le nez qui bougent tout le temps.
Je tombe par terre je me roule dans l'herbe. C'est tout doux, tout froid ! Je ris, j'arrête pas de rire !
"Maman" arrive avec Lilyah. Elles sourient, on dirait qu'elles brillent...
Jonas est très étonné.
L'homme aux cheveux blancs, regarde l'herbe avec un drôle de regard, il a l'air très fatigué, non, il est très fatigué et ça me fait peur.
Mike rigole et parle de ce qu'il y a ici.
Et celui avec une cicatrice... Il semble normal mais je sens qu'il est content, heureux et que ça sourit dans sa tête.
Des voix... Des voix... Comme dans mon rêve avec les Xorth... Plein de voix, très différentes...
"Les Xorths... Les Xorths... Ils parlent..."
Xorth :
Chez moi ! J’étais chez moi !
J’étais parti depuis tellement longtemps déjà ! J’en avais presque oublié les odeurs, les sons, les couleurs ! Je m’allongeai dans l’herbe, m’imprégnant odeur, me laissant porter sur ce tapis moelleux. Kara elle, roulait follement sur ce tapis vert à côté de moi.
C’est quoi ça ?
Je crois que je le connais !
Ce ne serait pas Xorth ?
Je me redressai rapidement. Quelqu’un m’avait appelé ! Kara, tout comme moi, regardait autour d’elle.
Mais oui, c’est bien Xorth !
Cette voix… je connaissais cette voix !
_ Bethia ? dis-je à haute voix. C’est toi ?
Un craquement ! Je fis volte-face. Une Nimrodh sorti de l’ombre du bois voisin.
_ Berthia ! criai-je, fou de joie.
_ Xorth ! Plus personne n’espérait ton retour !
Nous nous touchâmes la truffe en guise de salut. Puis je la pris dans mes bras.
_ Mais je suis de retour… ma chère sœur !
_ Quelles sont les étranges créatures qui t’accompagnent ? me demanda-t-elle.
_ J’ai accompli ce pour quoi j’étais parti ! lui soufflais-je.
Elle me regarda, les pupilles réduites à de simples traits en signe de surprise.
_ Tu veux dire que… C’est vraiment les…
_ En fait, oui et non, dis-je. Mais ils vont nous aider !
Je me tournai alors vers mes compagnons de voyage.
_ Voici des Dieux, annonçai-je. Mais ils se donnent le nom d’Humains.
Puis je continuai dans la langue humaine :
_ Mes amis, je vous présente ma sœur, Berthia.
Dr Nilane Bah :
Et voilà. Nous y sommes. Xorth et moi, on s'est préparé à ce moment. On a travaillé dur, ensemble, on a avancé, découvert des choses... Jusqu'à ce que nous nous posions, j'avais confiance, mais quand je croise le regard de cette femme chat – cette Nimrodh...
Il y a dans ses yeux une espèce de terreur, et en même temps... C'est indescriptible. Comme Xorth, elle nous prend pour des dieux. D'un seul coup, ça nous traverse, et se propage en nous comme un poison. Nous n'osons plus bouger, plus faire un mouvement. Les uns après les autres, nous nous figeons. Je retiens Kara, qui voulait se lancer vers la Nimrodh, pour la saluer, et la serre contre moi.
"Ne bouge pas, chérie, ne bouge pas. Il ne faut pas lui faire peur. Laisse Xorth lui expliquer"
Lui expliquer ? Va-t-il vraiment le faire ? Va-t-il vraiment imposer à sa soeur le choc qu'il a subit ? Non, bien sûr. Il l'épargnera. Et cette créature va continuer à nous regarder comme ça.
Impossible de supporter un tel regard. Je détourne les deux. A coté de moi, Janus fixe le sol. Je suis assez près pour le sentir trembler. Oui, je ne rêve pas, il tremble.
_Janus, murmuré-je. Tout va bien. Ne bougez pas.
_ Qu'elle cesse de nous fixer, marmonne tout bas le Balafré, d'un ton qui ne lui est pas coutumier. Qu'elle cesse de nous fixer comme ça, ou je...
_ Calmez vous, Janus. Vous êtes avec nous.
Je ne sais par pourquoi je dis ça. Je ne sais pas exactement de quoi il a peur. Je ne sais pas quel lourd passé cet homme traîne derrière lui, à quelle insupportable vérité de lui-même le regard de la jeune Nimrodh peut le renvoyer. Nous sommes tous mal à l'aise. Nous savons que nous sommes des créatures imparfaites, faibles, mesquines, et lâches. Nous savons que nous sommes chargés de pêchés. Mais les Nimrodh ont besoin de croire en nous. C'est presque insupportable à concevoir. Ils attendent de nous que nous soyons des dieux.
"Qu'est-ce qu'ils se disent, Kara ?"
"Xorth raconte son voyage, comment il a passé le grand anneau de pierre, comment il s'est retrouvé dans la grande coquille vide. Et puis il parle de moi, il dit que grâce à moi, il a apprit à vous parler, parce que nous ne comprenons pas le langage des Nimrodh. Et maintenant, il parle de toi. Il dit que tu es la soercyé, et que tu vas soigner et guérir ceux qui meurent"
Soigner et guérir ceux qui meurent... Oh, mon Dieu, pourvu que j'en soit capable !
Xorth a senti mon doute. Je le sens qui pénètre dans ma tête. Il ravive le souvenir de toutes ces heures que nous avons passée ensemble dans le labo, à étudier ses défenses immunitaires. Il me rappelle le sentiment de triomphe qui m'a envahit, lorsque j'ai trouvé comment développer les capacités de la glande qui lui donne le don de cicatriser, et de lire dans les esprit. "J'ai confiance en vous, soercyé". Merci, Xorth.
Je souris, et me décide à avancer, la main tendue.
_ Bonjour, heu... Cheulos, Berthia.
Elle a un mouvement de recul. Je m'immobilise de nouveau, la main tendue, ne sachant quoi faire.
Xorth attrape délicatement sa soeur par le bras, et l'amène devant moi. Il pose la main griffue dans la mienne, et lui montre comment la serrer et la secouer. Les moustaches de la Nimrodh frémissent. Elle retire sa patte aussitôt qu'elle le peut. Je reste immobile, confuse, penaude.
"Il faudra du temps," me dit Xorth pas télépathie.
Je soupire. Du temps.
Percevant ma pensée, Xorth se tourne vers sa soeur, et se remet à lui parler.
"Il lui demande comment vont les autres, traduit Kara dans ma tête (Je sens que cette fois, tous mes compagnons l'entendent); et elle lui donne le nom de tous ceux qui sont..."
"Oui, j'ai compris, ma Kara. N'écoute plus"
Xorth me communique la vision de son village, telle que lui transmet sa soeur. Je vois les ravages causés par la maladie.
Le bûcher d'incinération ne cesse pas de brûler. Les chants funéraires raisonnent à longueur de journée. Tant de frères disparus, rendus à la terre, rendus à la nature.
Une pensée me vient soudain et me serre le ventre d'angoisse. Ce n'est que le peuple de Xorth qui m'est montré là. Combien y a-t-il de Nimrodh sur cette planète ? Combien de Nimrodh, sur combien de pays, combien de continents. Comment pourrais-je les sauver, moi, toute seule ? Je ne pourrais pas. Je ne pourrais préserver la race qu'en sauvant ceux qui sont à ma portée, pendant que tous les autres mourront sans secours.
Ce n'est pas le moment, Nilane ma fille, ce n'est pas le moment d'avoir la nausée.
Des bruissement alerte nos sens tout autour. Des dizaines et des dizaines de Nimrodh nous rejoignent, nous entourent, tout en se tenant à une distance raisonnable. C'est Berthia sans doute, qui les appelle par télépathie. Pas un cri. Pas un hourra, pas un rejet. Ils sont immobiles et nous contemplent. Comment réagirais-je, moi, si Dieu prenait corps et venait me rencontrer ? Eux semblent hésiter.
Un homme chat courbé et hésitant -un vieillard- sort du cercle et s'avance vers nous. Xorth me souffle à l'esprit que c'est l'ancien, le dernier ancien à être encore en vie. Il s'avance vers moi.
Oui, ce sera lui, lui le seul interlocuteur possible. A lui seul, qui est âgé, qui a tout vu, nous pourrons expliquer.
Je me détache de Kara, je m'avance vers l'ancien, et m'agenouille devant lui.
Il se fige.
Un frémissement traverse les rangs Nimrodh.
"Soercyé, que faites-vous ? Pourquoi essayez vous de paraître plus petite ? Vous êtes un Dieu, pour eux, ne faite pas ça !"
"Xorth, traduis mes parole."
"Mais..."
"S'il te plait"
Je penche la tête vers le sol, et murmure.
_ Chez nous, on s'agenouille pour s'humilier, pour demander pardon. Au nom de ma race, je demande pardon aux Nimrodh. Pardon d'arriver si tard. Pardon de vous avoir laissé sans secours si longtemps. Au nom de ma race, je demande la permission de me racheter, en tâchant de sauver les Nimrodh de la maladie qui les ronge.
Ce n'est pas le langage d'un dieu, mais ce n'est pas le langage d'un être calculateur et froid. Que les Nimrodh aient de leurs créateurs l'image d'êtres honorables, même s’ils ne sont pas divins. Ils pourront continuer à croire.
"Soercyé, l'ancien ne sait pas comment il doit vous répondre."
"S'il accepte mon aide, il doit me relever en me prenant les mains."
Je n'entends pas Xorth transmettre ma réponse, mais le vieillard se penche sur moi et me relève. Il me parle d'une voix douce.
"Il vous demande de nous suivre au village, et d'accepter notre humble hospitalité."
"Nous le suivons."
Je fais un signe derrière moi. Tous mes compagnons, même Rhoan, semblent sensible à l'importance symbolique qu'on nous donne. Seule Kara reste naturelle, et regarde les Nimrodh avec curiosité. Elle meurt d'envie de jouer avec eux. Je sens qu'elle tente déjà d'entamer des dialogues télépathiques avec quelques uns.
"Ma Kara, tu ne peux pas leur parler, Xorth nous l'as expliqué. La télépathie ne marche qu'avec ceux qui parlent ta langue, sauf entre vous deux."
"On dirait qu'ils ont peur de nous, Maman"
"Non, ils n'ont pas peur. Ils sont juste stupéfaits de nous voir."
En file indienne, silencieux, nous nous mettons lentement en marche à la suite de l'Ancien. Xorth, toujours tenant sa soeur par la main, ferme le cortège.
Autour de nous, les Nimrodh s'éparpillent et s'envolent plus qu'ils ne bondissent, vers les branches hautes des arbres, bondissant de l'un à l'autre, partant au-devant de nous. C'est ainsi qu'ils ont coutume de se déplacer, je l'ai bien compris, en observant Xorth.
"Xorth, notre race ne sait pas grimper au arbre."
Je m'arrête, et tous les autres derrière moi en font autant, à l'orée de la clairière. L'ancien nous observe, étonnés.
"Dis-lui, Xorth. Nous ne grimpons pas aux arbres. Notre race ne sait que marcher."
Xorth, bondissant sur un tronc près de lui, rejoint l'ancien en quelque bon, et lui parle. Le vieillard paraît incrédule. C'est pourtant vrai. Nous sommes une race qui marche.
L'ancien nous fait un signe de la main, et s'avance, à pied sous la ramure.
Je m'inquiète. Il est vieux, et c'est un exercice dont il n'a pas l'habitude.
Je devrais essayer de hâter le pas, d'entraîner mes compagnons, mais je ne puis. Je me sens peu sûre de l'endroit où je pose mes semelles.
A l'ombre des hauts arbres, les folles herbes vertes, grasse, douce, qui nous ont accueillie à la sortie du Magellan se raréfient, découvrant un humus d'une étrange couleur mauve. Sur ce sol, vierge de tout sentier, fourmille une population d'insectes étranges, aux formes biscornues, aux couleurs inattendues, du rouge, du jaune. La lumière du jour tombe en tâches blanches, sur le sol nu. Les arbres, aux troncs lisse et caoutchouteux, aux feuilles rondes, sont de plus en plus grand, au fur et à mesure qu'on s'avance, et leur branche de plus en plus hautes. Des sons inconnus descendent des ramures, caressant nos oreilles, sans les surprendre. Ici, les oiseaux ne crient pas, ils murmurent. Pas un souffle de vent, dans ce sanctuaire de bois et de fougère. Tout y semble tranquille, protégé par la couverture verte qui lui sert de ciel.
Un mouvement imperceptible, à ma gauche. Une créature serpentine, couverte de fourrure, s'échappe vivement.
Que de nouvelles espèces ! J'ouvre les yeux grands, malgré moi. Je suis redevenue petite fille. Une irrésistible sérénité se dégage de cet endroit, et pourtant, rien n'y reste immobile. Il y a tant à voir, tant à observer.
Un soupir me ramène à la réalité. L'ancien se fatigue.
_ Xorth, propose-lui de faire une pause.
_ Je lui ai déjà proposé, Soercyé. Il refuse. Nous sommes bientôt arriver.
En effet, je perçois de nouveau mouvements, dans les branches, au dessus de nos têtes. Plus de fuite, cette fois. De la curiosité. Un océan de phosphore qui luit à travers la verdure. Des centaines, des centaines de regard, et pas un murmure pour s'étonner de notre allure. Nous n'avons pas de fourrure. Nous sommes étrangement vêtus.
Et soudain, au détour d'un tronc, ça me frappe.
Une éclaircie soudaine, parmi les arbres millénaire. Et sur tous les troncs entre toutes les branche, de petite habitation de bois et d'écorce, de forme coniques - pour la pluie, sans doute... Des passerelles, ça et là, semble faciliter l'accès à ces huttes. Pas de pont, pas de corde, pour aller de l'une à l'autre. Alors que nous passons sous l'une de ces petites maisons, je lève la tête. Elle semble si fragile, et pourtant si je peux juger la façon dont l'arbre a fait corps avec elle, elle est là depuis des siècles. Comment un assemblage de bois peut-il être si solide ?
Une odeur acre frappe mes narines, mettant fin à mon émerveillement. Sans l'avoir jamais sentie, je la reconnais, immédiatement. C'est l'odeur du bûcher funéraire.
Ils brûlent leurs morts. C'est normal, beaucoup de civilisation primitive terrienne le faisait. Mais le dégoût s'est emparé de moi. Tous ces corps, réduits en cendre. Les corps de ces incroyables créatures, anéantis, par ce maudit élément destructeur. Je serre les dents, essaye de ne plus faire attention à l'odeur, de sentir autre chose.
_ C'est magnifique, s'extasie Lilyah. C'est comme...
Je n'écoute pas.
L'arbre vers lequel l'ancien nous dirige n'est pas pourvu de passerelle. Il ne porte qu'une seule hutte, plus vaste que les autres, à quinze mettre du sol.
Des Nimrodh viennent près de nous. L'un deux, un joyeux adolescent au pelage gris, s'approche de moi, et m'attrape à bras le corps. Avant d'avoir compris ce qui m'arrivait, je me sens arrachée au sol, secouée, ballottée, entraînée vers le haut. Ça ne dure que quelque seconde. J'ai à peine le temps de reprendre mes esprits que je suis debout, sur le plancher de la grande hutte. Mes compagnons, derrière moi, atterrissent l'un après l'autre, apporté assez peu délicatement, pas d'autre hommes-chats.
_ Kara !
Je me retourne et cherche. Mais ma petite fille sort des bras d'une Nimrodh à la fourrure orange en battant des mains.
_ Oh, maman, c'était trop drôle ! Je peux recommencer ?
_ Plus... Plus tard, ma chérie.
Seigneur, elle aurait pu tomber !
L'ancien me parle :
_ Il vous invite à partager son repas, dit Xorth.
Je constate en effet qu'une couverture a été tendu sur le plancher de la hutte. Dessus, des fruits étranges, rappelant vaguement les goyaves, mais de couleur rose, et de la viande cuite. Je transmets mes remerciements à l'ancien et m'agenouille sur la couverture.
_ Ne mangez que la viande, pour l'instant, dis-je à mes compagnons. Ne touchez ni aux fruits, ni aux herbes qui les accompagnent.
A coté de moi, délicatement, Rhoan a découpé l'un des fruits roses. Il en met le morceau dans le petit analyseur portatif que je lui ai fait emporté. Je mords dans un quartier de viande à belles dents. Ça rappelle le boeuf, c'est plus tendre, mais c'est assez fade. Mike a l'air, lui, de bien apprécier. Lilyah grignote, du bout des dents, assez dubitative. Atrayde et le balafré n'ont pas encore touché à la moindre nourriture.
_ Mangez de la viande, leur dis-je. Vous risquez de les vexer. La viande n'est pas une menace, pour nous, d'après les archives que j'ai lu, ce sont les végétaux qui ont empoisonnés nos ancêtres sur cette planète.
L'analyseur sonne, il a fini. Rhoan me montre l'écran. Le toxique répertoriée par la première expédition Epsolin semble avoir totalement disparut. Les Nimrodh ont accomplit leur tache. La planète est à présent viable pour les êtres humains.
_ Vous pouvez vous servir de fruits, dis-je à mes compagnons. Ils ne sont plus dangereux. Le projet Jenova a été une réussite.
_ Assez cynique, ce que vous dites là, docteur, me souffle Rhoan dans l'oreille.
_ Cynique ? Non. Les Nimrodh sont peut-être le fruit d'une expérience scientifique, mais ce n'est pas déshonorant pour eux. Nos enfants naissent parce que nous les créons. Ils sont nos enfants. Nous plaçons en eux des espoirs, qu'ils peuvent ne pas combler, ou combler, ils restent malgré tous nos enfants.
_ Avouez que ces enfants là ont été utiles, ils nous permettent de nous nourrir de ce que nous trouvons sur cette planète, sans danger de perdre la tête.
_ Je n'ai pas envie de discuter de ça avec vous maintenant, Rhoan. Mangez, s'il vous plait. Vous mangez à peine, ces derniers temps.
_ Je me nourris autant qu'il me plait. Laissez-moi tranquille.
Avec brusquerie, il se détourne.
Je retiens un sursaut. J'ai vu un frisson le parcourir, au moment où j'ai fait référence à son manque d'appétit. C'est la deuxième fois que je surprends un signe de faiblesse de ça part. C'est pourtant vrai, qu'il semble épuisé, mais...
Non, il est bel et bien épuisé. Je ne peux pas me le cacher à moi-même plus longtemps. Ce n'est pas la simple fatigue de quelqu'un qui se remet d'années de captivité trop longues. Loin de s'améliorer, son état de faiblesse s'aggrave.
C'était sous mes yeux, et je n'ai rien vu. Je n'ai pas voulu regarder.
Pas maintenant. Pas tout de suite. Ce soir, au Magellan, j'insisterai pour l'examiner. Mais là...
J'observe la hutte. Elle est composée de deux partie, le plancher sur lequel nous mangeons, et une passerelle au dessus de nos tête, constituant un deuxième étage, celui où l'ancien dort, je suppose.
J'ai arrêté de manger. L'ancien se tourne vers moi, il devait attendre cela pour me parler.
_ Soercyé, l'ancien vous remercie d'être venue, et vous demande quels sont vos ordres.
_ Mes ordres ?
_ Il veut savoir ce qu'il faut faire pour guérir les malades.
_ Il faut que je puisse les voir, avant tout.
Nous y sommes. Je croise les regarde des Nimrodh resté dans l'assistance, autour de nous. Ils sont pleins d'espoir. Ils sont persuadés que je vais faire un miracle. Mais, je ne peux pas faire de miracle. Si je parviens à faire quelque chose, ça prendra du temps.
_ Il faut que je voie les malades, dis-je. Ensuite, je ferais ce que je peux, mais ça prendra du temps.
Xorth traduit mes paroles, qui provoque autour de nous des murmures.
Je surprends un regard étrange, de la part de Lilyah. Elle semble me guetter. Comme si j'étais en train de passer une épreuve. Une épreuve dont je ne connais pas l'enjeu.
Je vois soudain un Nimrodh, plus petit que les autres, un jeune, à la fourrure d'une blancheur immaculée qui s'avance vers moi.
Son regard a quelque chose d'accusateur. Il me parle d'une fois tremblante, mais pleine de défit.
_ Soercyé. Aneg veut savoir si vous guérirez sa mère.
Dis lui que je vais faire tout ce qui est en mon pouvoir pour ça.
Xorth traduit. Nouveaux murmure. Ce n'est évidemment pas la réponse qu'ils espéraient. Il voudrait que je leur promette de réussir. Mais je ne le peux pas.
Le jeune félin blanc continue à me fixer, et me repose une nouvelle question.
_ Aneg veut savoir s'il est dans votre pouvoir de guérir sa mère.
_ Pour l'instant non, mais...
_ Docteur !
Lilyah, s'est soudain redressée, une lumière furieuse dans son regard.
_ Vous... Vous ne pouvez pas leur dire ça ! Xorth, ne traduis pas !
_ Lilyah ? s'étonne Mike à coté d'elle. Qu'est-ce qui te prends ?
_ Docteur, vous ne pouvez pas leur dire que vous n'avez pas le pouvoir de les guérir, vous êtes là pour ça, tous vos espoirs sont en vous.
_ Justement. Je ne peux pas leur promettre plus que ce que je peux accomplir. Je ferais tout ce qui est en mon pouvoir, comment pourrais-je faire plus ?
_ Ils sont malades ! Ils ont besoin de vous !
_ Qu'est-ce qui vous arrive, Lilyah ? Je n'ai pas l'intention de les abandonner à leur sort !
_ Vraiment ? Ils vous intéressent comme de nouveaux objets d'études, mais une fois que vous en aurez appris suffisamment, que ferez vous ?
_ Lilyah, au nom du ciel, calme-toi ! souffle Mike en tentant de la faire rasseoir. Ce n'est pas le moment !
Lilyah hésite, mais se laisse rasseoir. Je me retourne vers Xorth.
_ Dis lui que j'ai beaucoup de pouvoir, mais que je ne peux être sûre de rien.
Xorth traduit la réponse. Le jeune chat se mets alors à crier. Pas besoin de Xorth pour comprendre. Il dit "Imposture ! Imposture!" Il dit la même chose que Lilyah. Que je ne chercherais pas à les guérir. Oui. Je ne suis pas une déesse, juste une humaine. Je ne peux pas promettre de réussir.
Plusieurs Nimrodh essaye de calmer Aneg, mais je sens le doute qui envahit quelques uns. Janus s'est soudain levé.
_ Xorth, traduis ce que je vais dire.
Xorth appelle au silence d'une voix forte. Une fois le calme rétabli, le Balafré commence, d'une voix très sereine, mais déterminer.
_ Le docteur Bah et les autres vont retourner au Magellan. Vous, les Nimrodh, vous y transporterez vos malades, pour qu'elle puisse les y soigner. Moi, je resterai avec vous, je partagerais vos tâches quotidiennes et tenterai d'aider votre communauté du mieux que je peux. Si aucun des malades ne survit, malgré les soins du docteur, vous serez libre de vous venger sur moi de la façon dont vous le déciderez.
_ Janus ! M'écris-je. Vous êtes fou ?
Il me regarde avec un sourire. Le premier sourire que je lui vois faire.
_ Fou ? Non, docteur. Je vous ai vu opérer le militaire. Une opération que vous n'aviez jamais faite. Et que vous avez réussie. Vous êtes un bon médecin, vous avez beaucoup de talents. Je vous fais confiance.
Confiance. Tous me font confiance. Comme cette confiance est lourde à porter !
L'ancien parle. Xorth traduit.
_ Il dit que Celui-qui-a-une-marque-sur-le-visage parle sagement, et vous demande d'excuser Aneg pour son insolence, du à son jeune âge. Il dit qu'il sera plus qu'honoré de garder le Dieu-qui-a-une-marque-sur-le-visage pendant que la Soercyé guérira les malades.
Le sort en est jeté. Impossible de revenir en arrière.
Je me relève.
_ Nous allons retourner au Magellan immédiatement. Qu'on m'amène les malades. Xorth, j'ai une chose à te demander.
Je sors de ma sacoche un récipient isotherme et des pincettes.
_ Cette pierre par laquelle le Mal vous est venu, je voudrais que tu me la rapportes, dans ce récipient. Attention, ne la touche pas. Sers-toi de ces pinces pour la prendre.
_ Bien, soercyé.
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