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Chapitre VI :La cité du destin

Illustrations par Kalli.

Tandis que Len Arken, le huitième compagnon, part de son côté, ne sachant pas encore s'il aurait intérêt à participer à cette histoire, l'elfe Sylvain, Farkas Tedzec, révèle plusieurs de ses secrets _ sa capacité à se changer en dragon, entre autre_ pour emmener le groupe en sécurité à Aramath Caras, cité Haute Elfe. Tan Klaroz, lentement, se laisse apprivoiser par Sabrane, l'apprenti-mage.



Len Arken :

           J'avais espionné toute la conversation et tout cela me semblait fort intéressant.
           Seul problème, les gardes se rapprochaient de l'endroit où ils étaient dans la forêt.
« Fais-nous sortir de cette forêt, Sabrane. Prononce une incantation.
_ Lui ? Avec lui, Dame Bianne, nous ne pouvons nullement prévoir où nous atterrirons.
_ En effet, Messire Vessiel. Personne ne pourra le prévoir, et surtout pas Biran Sted. Allons, rapprochez-vous tous, et donnez vous la main. »
           Oh non, pas ça, quelle idée a la c...
« In...Incantate Villa »
            Il y eut un éclair, puis ils disparurent.
            Ah, bravo! On a de la chance s'ils ne sont pas tombés sur une autre planète.
           Mais déjà, les gardes, ne comprenant pas, venaient de tomber les uns sur les autres, à force de se rapprocher beaucoup trop en cercle.
« Que s'est-il passé? »
_ Ils ont disparu!
_ J'étais sûr de les avoir vus là, il y a cinq minutes!
_ Là haut! »
            C'est pas vrai!
           Je sautai dans l'arbre le plus proche, et je recommençai mon envolée sylvestre, esquivant des flèches ici et là.
           A peine dix minutes plus tard, je les avais semés.
           Je me dirigeai vers la ville la plus proche tout en me repassant la conversation dans ma tête.
            Donc, pour eux, j'étais le huitième compagnon de cette quête. Ca avait l'air de se tenir.
            Bon, pour récapituler, tout avait l'air de tourner autour de ce Tan-Klaroz, apparemment recherché pour un pouvoir ou je sais pas quoi.
            De la conversation, j'avais réussi à retenir le nom de "Biran Sted". Première étape, trouver des infos en enquêtant sur cette personne. J'avais déjà une petite idée de comment m'y prendre quand j'arrivai à la ville.

Thurim Vessiel :

            Un portail lumineux. Pour ce genre de magie, les elfes ont toujours su créer. Lorsque nous sortîmes du très court tunnel blanc qui constituait l'entrée de cet "endroit sûr" que nous avait promis notre ami, je jetai un coup derrière moi, regardai le portail se fermer. C'est alors qu'il déclara :
« Bienvenus à Amarath Caras, la cité du destin ! »
           J'avais déjà entendu ce nom quelques fois, parmi Jerith Radras, Lim Azul, et tant d'autres villes elfes dont je connaissais depuis des années les principaux éléments d'histoire, fussent-ils plus vieux que la magie elle-même. Je me retournai alors, face à l'immense voûte de marbre blanc qui faisait office d'entrée de la cité. Il nous invita alors à le suivre, ce que nous fîmes vite après nous être courtement extasiés sur la vision de cet autre monde qui s'étalait devant nous.
            Après une demi heure de marche, nous avions à peine atteint la périphérie de la cité. D'après notre ami Farkas, elle s'étendait sur plus de quatre cents lieues à la ronde. La magnificence des colonnes blanches millénaires contant l'histoire de l'endroit, et dispersées partout dans la ville, n'avait d'égales que les sculptures, les jardins publiques immenses, les bâtiments importants qui représentaient toute la culture de ses habitants. J'aurais pu rester pendant des heures à simplement observer sur un banc de marbre la statue de Dran Fell, qui trônait, fière et élancée, sur l'une des très nombreuses places publiques. Non seulement ce lieu d'une magie infinie s'étendait à n'en plus finir, mais il y avait aussi plusieurs niveaux de hauteur ; quatre, pour être précis. Nous pouvions d'ailleurs apercevoir le point culminant de là où nous marchions : le splendide Palais du Roi Setho Caras, lui même. J'aurais bien aimé admirer ces fameuses toiles peintes à l'huile magique qui ornaient chaque couloir de ce somptueux bâtiment, ainsi que les nombreuses salles où étaient exposés trésors de guerre anciens, collections d'objets racontant moult batailles glorieuses et d'autre impressionnants artefacts de nature éthérée ou purement magique.
              Nous, pauvres étrangers dans cette merveilleuse cité, nous n'étions pas habilités à nous y rendre sans une excellente raison. Aux vues des regards interrogateurs, rieurs, parfois inquiets, ou tout simplement curieux que nous lançaient les habitants que nous croisions au fur et au mesure de nos pérégrinations dans les grandes avenues, nous n'allions pas passer très longtemps inaperçus. Même la tenue vestimentaire du "haut elfe moyen" me surprenait. Couverts de fines tuniques, cousues de fils d'or, de mythril et portant à divers endroits de leur corps, un, voir plusieurs bijoux d'une rare beauté. Je me rendis alors compte que j'ignorais bon nombre de choses sur ce dont parlais tout ses livres que je dévorais dans mon académie, avec pourtant une soif de connaissance que pouvait d'ordinaire n'éprouver que les novices. J'étais si émerveillé devant tant de beauté culturelle et architecturale que je ne pus remarquer ce que faisaient, ou entendre ce que disaient mes compagnons pendant ce temps. Farkas réussit cependant à attirer mon attention, alors qu'il s'approchait de moi.
« Aimez-vous cette cité Messire Vessiel ?
_  J'ai toujours été subjugué par toutes les belles créations pouvant sortir de l'esprit de votre race, j'ai hélas eu trop rarement l'occasion, de pouvoir les voir de mes yeux.
_  Nous devons maintenant nous diriger vers le Kel Thaniris !
_  La Délégation Centrale des Etrangers, voulez-vous dire !
           Il me fit un sourire amusé, un peu surpris de ma rapide traduction.
_  Oui, car comme vous l'aurez remarqué, vous allons vite nous faire remarquer, surtout vous, non elfes, dans la cité !
_  Et ensuite ?
_  J'aurais quelque chose à vous montrer. »
           Le ton qu'il avait employé dans cette dernière phrase me fit dire qu'il n'en dirait pas plus, quoi qu'il arrive. Amarath Caras se trouvait sur une autre plan d'existence par rapport au reste de tout Islotanra ; n'étant accessible que par la pure magie elfique, nous pouvions enfin reposer nos esprit et les vider de toute cette tension accumulée... pendant un court moment.


Val Harkan :

          Contrairement à mes "compagnons" qui restaient subjugués devant la magnificence de la cité, la vue s'offrant à mes yeux ne me causait qu’un profond chagrin. Les formes des bâtiments, les décorations. Tout cela ne faisait que ramener à ma mémoire de douloureux souvenirs. Des images défilaient dans ma tête. Nordhal, Nilona et bien d'autres. Puis vinrent les horreurs. L'invasion, le feu, les meurtres. Doucement, une larme s'échappa de mon oeil droit sans que je puisse la retenir. Je l'essuyais d'un geste lent, ne songeant pas une seconde à cacher cela à Bianne. Farkas me jeta un regard inquiet, puis engagea la conversation avec Vessiel. Tous deux partirent en avant et je suivis le mouvement.
           Soudain, en passant devant une rue, j'aperçu un mirage. Du moins c'est ce que je cru pendant un instant. Là, à seulement quatre mètres de moi. Sanila. Je m'élançai vers elle et l'appelai en elfique. Elle se retourna et je vis ses yeux verts s'agrandir en me voyant.
« Riel'nal ?
             Elle sourit et nous tombâmes littéralement dans les bras de l'autre.
_ Tu as survécu, murmurai-je en elfique.
_ J'ai pu m'enfuir quand les anciens ont fait diversion, répondit-elle d’une voix tremblante. Riel’Nal, je t'ai cru mort.
             Je la serrai un peu plus. Ainsi nous étions deux à avoir survécu au massacre. Elle me jeta un regard curieux et me demanda pourquoi j'étais habillé ainsi. Ne tenant pas plus que cela à ce qu'elle sache la nature de mon métier, je m'excusais, lui promettant une conversation prochaine, et rejoignit les autres. En passant devant Bianne, je remarquai qu'elle semblait lutter entre la compassion et un autre sentiment. Je lui adressai un regard froid qui la décida et elle me le rendit aussitôt.
             Nous continuâmes de suivre Farkas à travers la ville, vers un bâtiment imposant.
Un de ceux que je considérais comme les miens avait survécu. L’avenir me paru alors un peu moins sombre.


Skronk :

           Décidément dans ce pays ils ne font que ça. Marcher, dormir, marcher…
           Trop intrigué pour dire quoi que ce soit, Skronk se contente de suivre la troupe.
           Soudain, au bout de quelques kilomètres, l’elfe qui porte la lance s’arrête net. C’est peut être l’heure de manger. Mais à la grande déception de Skronk, il en est tout autre. L’elfe effectue une sorte de rituel débile. Il l’air de chanter avec sa lance, ce qui fait bien rire Skronk.
           Au bout de quelques minutes les arbres se mettent à bouger. Les yeux écarquillés, Skronk observe ce maléfice, et comme par hasard, tout le monde s’engouffre dans le passage, sans se poser de questions. C’est sûr que c’est bien naturel tout ça ? Et toutes ces questions qui se bousculent dans sa tête, ça, ça ne lui était jamais arrivé !
          A l’intérieur de cette chose, des bâtiments, des jardins, pas un grain de sable. Et ce blanc éclatant qui agresse les yeux quand on le regarde. Décidé à rester près de la dame -pour la protéger, pas parce que ce lieu ne lui inspire pas confiance - Skronk scrute tous les alentours. Bien que son ventre gargouille, il se doit de rester suffisamment vigilant pour attaquer en cas ou l’elfe à la lance se décide à les attirer dans un piège. Au fur et à mesure qu’il marche dans cette étrange citée, Skronk se sent épié, comme s’il était une proie, et ça l’énerve. Mais quelque chose au fond de lui l’empêche d’ouvrir la tête à cet elfe dédaigneux qui regarde passer le groupe avec de grands yeux.
          Cette promenade commence à être lassante. Skronk a faim, et il le fait savoir, en grommelant tout en marchant. L’homme en bleu sort soudain du rang pour aller se jeter dans les bras d’une fille. Finalement les coutumes de ce pays ne sont pas aussi idiotes que ses occupants. Skronk aime bien celle-là.
           Plus tard l’elfe se décide enfin à s’arrêter devant un bâtiment immense, aussi gros que la faim qui tiraille l’estomac de Skronk.
           Celui-ci s’approche de Farkas, le retient par l’épaule et lui demande :
« J’espère que tu amènes à manger, sinon c’est toi qui me servira de repas. Toi comprendre Skronk ? »


Bianne :

          
Avec Thurim Vessiel, nous tentons de convaincre le barbare de se tenir tranquille, tandis qu'un dignitaire de l'ambassade s'avance vers nous.
           Farkas le salue en Elfique, mais le dignitaire répond :
  " Pour ceux qui vous accompagne, nous parlerons en langue commune. Veuillez me suivre, je vous prie."
           Tandis que l'elfe et le sorcier pénètrent dans le luxueux bâtiment de marbre, je me retourne vers les enfants. Sabrane n'a pas quitté Tan-Klaroz depuis que nous sommes descendus du dos du dragon. Sans interruption, il devise joyeusement, commentant les magnificences qu'il voit avec volubilité. Et Tan-Klaroz l'écoute. A présent, on dirait qu'il s'accroche au discours de l'apprenti mage, comme à un arbre pour ne pas être emporté par la tempête. Depuis combien de temps ne lui a-t-on pas parlé ainsi ? C'est une sensation nouvelle, certainement. Je ne veux pas les interrompre. Pour découvrir les immenses pouvoirs qu'il a en lui, Tan-Klaroz devra ouvrir son cœur. Et cela, seul Sabrane peut le lui apprendre.
_  Entrez, dis-je simplement.
          Je guette par dessus leur épaule. Harkan est en train de nous rejoindre, après avoir quitté l'elfe qu'il avait enlacé. Une compagne d'antan... C'est la première fois que je le vois pleurer. Il est capable de pleurer, cet homme ?
           Je suis furieuse contre moi même. Pourquoi suis-je si perturbée ? Je n'ai pas à avoir de compassion pour Harkan. Il a perdu les siens ? Et alors ? Moi aussi, j'ai vu mon peuple mourir. Et la seule personne qui me restait encore, c'est lui-même qui me l'a pris. M'apitoyer sur son sort, à lui, c'est déplorable de ma part.
            Serrant les dents, je pénètre la dernière dans l'ambassade.
            Notre guide nous conduit à travers de longs corridors de pierre sculptée, décorée de feuilles d'or ciselée, et ouvert sur la lumière. Nous atteignons une grande salle, ou nous attend une elfe longue et fine, noblement vêtue, et à l'aspect autoritaire.
            Nous nous inclinons respectueusement devant elle.
« Soyez les bienvenus dans notre cité.
Nous remercions l'ambassadrice avec une formule de politesse, sauf le barbare, qui grogne :
_  Skronk a faim.
            Confus et honteux, notre sorcier tente de le faire taire et se répand en excuse, mais l'ambassadrice sourit. Elle frappe deux fois dans les mains, et des serviteurs apparaissent, portant des plateaux.
_  Installez-vous, dit-elle. Et racontez moi la raison de votre venue.
            Mes compagnons s'installent, tandis que Thurim Vessiel entame le récit de tout ce qui nous est arrivé depuis la veille, essayant de rendre aussi rationnelle que possible une histoire si folle. Par bonheur, l'ambassadrice semble une auditrice attentive.
           Je suis restée debout, à l'écart. Je n'ai pas faim. Je me sens mal. Tout ce luxe, ce marbre m'étouffe. Que de fioritures inutiles, sur ces murs ! Je me sens soudain manquer de quelque chose, de je ne sais quoi. Si je sais, c'est la douce et sobre austérité du palais où j'ai grandis, qui me manque. Dans ce bâtiment trop prétentieux, je me sens coupée du ciel... J'étouffe, il faut que je sorte.
           Thurim Vessiel continue son récit. C'est étrange comme il parvient à présenter les choses clairement. Nous ne nous connaissions pas la veille, mais nous avons été envoyés à Tan-Klaroz par diverses personnalités du monde de la magie et du savoir, puis nous avons découvert une vieille prophétie ancienne, nous sommant de protéger ce jeune homme jusqu'à ce qu'il ait accomplit son destin. Et nous avons accepté cette mission sans plus tergiverser.
          Je me penche sur Sabrane, et lui souffle à l'oreille.
_ Je m'éloigne un peu. Viens me chercher quand vous aurez fini ».
           Et, discrètement, je quitte la pièce, et cherche un escalier qui mène jusqu'à la terrasse.
Les elfes que je croise me regardent étrangement. Il y a-t-il quelque chose dans mon attitude qui dérange ? J'arrive enfin à l'air libre et respire à grandes goulées. J'observe la cité qui s'étale à mes pieds. C'est la première fois que j'entre dans une cité Elfe. Je devrais être curieuse, fière. Mais ce n'est pas cette ville là, que je voudrais voir, c'est la mienne, celle que le roi a détruite pierre après pierre, dans sa folie de conquête... Silence, Bianne. Plus de ça. Cette partie de ta vie est révolue, aujourd'hui, tu n'appartiens à personne.
           Je ferme les yeux pour laisser le soleil réchauffer ma peau, que le contact du marbre a glacée. Il faut que je profite de cet instant de paix. Il faudra être forte, ensuite.
           Une main se pose sur mon épaule et je sursaute. J'ouvre les yeux et me retourne. Un elfe, vêtu de vert, vient de me rejoindre. Son front s'orne d'une curieuse marque rouge. Blessure, tâche de naissance ? Je ne sais pas. Il me regarde sévèrement.
« Allez-vous en, me dit-il.
_  Je ... Je vous demande pardon ?
_  Allez-vous en. Si le jeune homme qui vous accompagne est bien celui dont parlent les livres depuis des siècles, cela signifie que la divinité dont le nom ne doit pas être prononcé va bientôt s'éveiller. L'ambassadrice ne vous chassera jamais, elle s'y refusera. Mais déjà, la nouvelle de votre arrivée s'est répandue, et ils sont nombreux à avoir peur. Votre présence sème le désordre et le chaos. Allez-vous en.
           Je soupire intérieurement.
« Messire, comme vous l'avez dit, si le jeune homme en question est celui dont parle les livres, c'est que la divinité dont le nom ne doit pas être prononcé va bientôt s'éveiller, et que lui seul aura le pouvoir de l'affronter. Il n'est pas là pour détruire mais pour protéger, et bien qu'il ne sache pas encore ce qu'il est, nous devons veiller à ce qu'il reste en vie. Ce n'est pas lui qui sème le désordre et le chaos, mais la peur que vous avez de lui. Oubliez les livres, et voyez avant tout un enfant, qui a besoin de protection.
_  C'est avant tout un assassin, le saviez-vous ? Lorsqu'il est passé sous le portique de la vérité, tout à l'heure, les pierres sont devenues rouges.
_  Je sais ce qu'il est, messire. Je le recherche depuis des mois. Avant de le retrouver sur le point d'être pendu dans la capitale, j'ai suivi toutes les pistes, celles de son enfance, entre autre. Il m'arrive souvent de tuer, pour défendre ma vie, ou pour venger quelqu'un. Val Harkan, lui, tue parce qu'on le paye. Lhao tue pour le plaisir. Pourtant, c'est lui qui vous fait peur. Lui a tué, aussi, mais par désespoir, c'est cela, qui est dérangeant, qu'on puisse tuer de manière irraisonnée, par simple désespoir.
_  C'est donc d'un fou, que dépend l'avenir du monde.
_  C'est de vous, messire, que cet avenir dépend. Il vous appartient de nous offrir l'asile nécessaire pour prendre le temps de ramener ce jeune homme de son désespoir et lui faire accepter sa destinée. Si nous devons continuer à fuir, cela sera plus difficile. Allez-vous laisser l'issue du combat que le monde attend depuis des millénaires devenir hasardeuse, juste par souci de ne pas affronter vos peurs ?
           Il me regarde d'un air curieux.
_ Vous ne parlez pas comme une chasseuse de prime. Qui êtes vous ?
_ Sait-on jamais qui nous sommes, réponds-je, balayant la question d'un revers de main.
_ Quelque chose en vous est étrange. Rien ne colle dans votre apparence. Vous semblez à la fois dure et sensible. Vous donnez l'air de n'avoir aucun scrupule, mais vous éprouvez de la compassion même pour vos ennemis.
_  Je suis une simple chasseuse de prime. On a fait appel à moi pour retrouver la trace de ce jeune homme, et je l'ai cherché des mois durant. J'ai donc compris petit à petit ce qu'il était, et ce que je devais vraiment faire.
_ Qu'étiez-vous avant d'être chasseuse de prime ?
             Il me regarde d'un air inquisiteur. Il est décidément bien trop insistant.
_  Peu importe ce que j'étais avant, dis-je avec un peu plus d'émotion que je voudrais. Cette partie là de moi est morte, et ne reviendras jamais plus !
_  Ma Dame, calmez-vous, je ne voulais pas vous offenser, me dit-il avec une révérence.
              Je m'énerve malgré moi.
_ Ne me faites pas cette révérence, elle est réservée aux personnes de sang royal.
_ Bien, ma dame. Si vous y tenez, je ne la ferais pas. »
            J'en ai assez entendu. Je quitte la terrasse et redescends vers la pièce où mes compagnons déjeunent.


Farkas Tedzek :

           L'ambassadrice écouta patiemment notre récit. Lorsque Thurim Vessiel parla de ma transformation, je perçus un léger froncement de sourcil, suivit de fréquents coups d’œils dans ma direction. Je savais parfaitement que l'ambassadrice ne dirait rien devant les autres, mais je me doutais déjà que je allai avoir de sérieuses remontrances ensuite. Je détournai le regard et regardai mes compagnons de voyage narrer leurs histoires. Au bout d'un moment, je vis Bianne glisser un mot à l'oreille du jeune mage, Sabrane je crois, et se faufiler vers la terrasse. Mon attention revint alors sur le jeune mage et son voisin, Tan-Klaroz. Sa tunique était déchirée sur le devant, laissant voir la peau du torse. Il fit un mouvement pour se mettre plus à l'aise sur le siège et se fut à ce moment que je le vit: L'objet de ma quête, la cause de mon exil. Je compris alors pourquoi j'avais instinctivement choisi de le suivre: Il l'avait, c'était lui qui l'avait volé ! Je me forçai à contenir ma rage et ma colère, sentiments indignes chez un elfe digne de ce nom. Il faudrait que je lui parle. Il DEVAIT me fournir des explications.
           Je remarquai alors que tout le monde se levait. La séance était terminée. Alors que je me tournai pour les suivre, l'ambassadrice me rappela:
« Farkas Tedzek ? Je dois vous parler.
_ Oui ma Dame ? Demandai-je, alors que je savais parfaitement de quoi il retournait.
_ Je n'ai pas apprécié votre conduite telle que ces étrangers me l'ont décrite.
_ J'ai fait ce qu'il me semblait juste ma Dame, répondis-je pour me défendre.
_ Mais il y a des limites ! Explosa-t-elle.
           C'était la première fois que je voyais l'ambassadrice en colère. Cela me terrorisa.
_ Utiliser votre don de métamorphose ! En public de plus ! Résuma-t-elle. Puis les amener ici ! Mais qu'est-ce qui vous a pris ? Ne savez-vous pas que seuls les elfes sont acceptés ici ? Et encore… Les elfes noirs, ces vermines, sont chassés à coup de pieds quand ils parviennent à entrer !
           Je n'osai dire un mot. Elle avait parfaitement raison, et je le savais.
_  Bien sûr, nous ne pouvons pas les chasser. Ceci nuirait à notre réputation de peuple pacifique et accueillant.
           Elle fit une pause pour reprendre son souffle, puis reprit, d'un ton plus calme mais froid:
_  Il me semble que vous avez été chassé de votre village pour une faute grave. Vous savez sans doute que vous ne pouvez revenir au sein de notre peuple sans avoir réparé cette faute. J'espère que sur ce point, vous avez honoré votre tâche.
_ Précisément, ma Dame, répondis-je. Il se trouve que c’est l'une de ces personnes qui le détient.
           Un air surpris s'afficha sur son visage.
_ Tiens donc ! Et de qui s'agit-il ?
_ De Tan-Klaroz ma Dame. Du garçon de la prophétie, annonçai-je. C'est pour cela que je suis venu avec lui.
           Elle réfléchit quelques instants.
_ Tout compte fait, il se trouve que la situation se retourne à notre avantage. Vous pouvez vous en aller Farkas, votre faute est considérée comme réparée... du moment que vous ramenez l'objet en question.
_ Merci ma Dame, dis-je en m'inclinant, considérez que c'est fait.
           La discussion était close. Alors que je me retirai, elle me lança:
_ Votre sœur est ici, Farkas, transmettez-lui tous mes vœux de ma part pour ses fiançailles !
_ Oui ma Dame. »
           Puis je me tournai et sorti du bâtiment, pensif. Ainsi donc, ma sœur était ici ?
           Lorsque j'avais été banni, elle était si jeune qu'il n'était même pas sûr qu'elle puisse se souvenir de moi. Voilà qu'elle était ici. Et elle était fiancée? je me devais d'aller la congratuler pour cet heureux évènement. Mais avant cela, il me fallait rejoindre mes compagnons: J'avais une promesse à tenir...
 
 



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